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VICTOIRE DE LA GAUCHE AU PÉROU. QUELQUES PARALLÈLES AVEC LA FRANCE

Le Pérou vient d’élire pour la première fois de son histoire un président pauvre, indien et de gauche, le 6 juin 2021.

Que s’est-il passé ? Une profonde crise idéologique avait sapé les bases de l’ordo-libéralisme imposé par le président Fujimori dans la constitution.

L’Etat péruvien était devenu au fil des ans dirigé par une véritable mafia politico-économique, où la majorité des députés et chefs d’entreprise s’échangeaient des lois contre des pots-de-vin. Au point que ce pays était devenu l’un des plus corrompus du continent. Ses cinq présidents encore vivants étaient tous soit condamnés, soit inculpés, dont un, Alan Garcia, se suicida au moment de son arrestation (https://www.liberation.fr/planete/ 2020/11/13/le-perou-ce-pays-qui-devore-ses-presidents_1805401/).

Les sondages précédant cette présidentielle montraient une envie populaire de changer la constitution : plus de 80 % des sondés n’en voulaient plus.

Seule la gauche s’engageait clairement à la modifier.

La droite a alors dû lancer toutes ses forces médiatiques, hégémoniques, dans la bataille de reconquête de l’électorat. C’est ainsi que l’extrême droite, militariste, ultra-libérale, corrompue parvint au second tour (la propre fille du président Fujimori, sous les barreaux, elle-même inculpée pour corruption), mais derrière la gauche marxiste de Castillo, indien mal nommé ! Le deuxième tour, très serré, fut l’occasion de contestation, de manifestations de racisme, de menaces de putsch (des centaines d’officiers manifestèrent contre le candidat Castillo). Le candidat de la gauche l’emporta finalement de justesse, avec 50,12% des voix et le soutien de la cour suprême, ainsi que d’une bonne partie du monde judiciaire pour qui la victoire de Fujimori aurait représenté celle de la délinquance et de l’impunité de haut vol.

A l’image du monde judiciaire, le centre-droit préféra soutenir à l’assemblée la gauche qui n’y comptait que 40% de députés, dont une majorité, 25% du parti de Castillo. Pérou libre a été fondé par un chirurgien marxiste-léniniste formé à Cuba : Vladimir Cerron, auparavant gouverneur d’une province. Le gouvernement actuel est à l’image de ce compromis.

Le symbole du parti Pérou libre, un crayon, fait de l’éducation publique la priorité de ce gouvernement. Il devra aussi desserrer l’étreinte de la droite, notamment en faisant élire une assemblée constituante comme il s’y est engagé et en bénéficiant du jugement du principal parti de droite de l’assemblée, qualifié d’association de malfaiteurs par un juge !!!

Une constitution ou des traités ultra-libéraux, des médias quasi-unanimement aux ordres du patronat, une extrême droite puissante, une gauche faible mais en progression car surfant sur des besoins sociaux évidents, …

Des classes populaires faisant irruption dans le champ social et politique, face à une élite toisant “ des gens qui ne sont rien”, inspirée d’un ostracisme sinon ethnique au moins social ? Un monde de la justice à genoux, luttant contre l’impunité des gouvernants ?

Cela ne nous laisse-t-il pas une impression de déjà-vu, en France ?

Enfin une union de réformistes et de gauche de transformation réussissant in fine à gouverner, est-elle envisageable dans l’hexagone à court terme ?

La C.I.S.E. se réjouit de cette victoire, potentiellement annonciatrice de nouvelles défaites d’un monde politique suranné et toxique.

Vincent Buard

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